Archive for mars, 2019
Quatrième texte de l’écrivaine en résidence
On est dimanche
La poussière retombe
Le cœur se dépose
Les plexus se détendent
J’ai fait mes bagages
Maman s’en vient
J’étais pas vraiment loin
J’suis jamais vraiment loin
Même si on s’voit pas
J’étais partie voir des gens
Je sais, ça ressemble pas à ça
un travail d’habitude
Maman est chanceuse
J’écris dans le silence
Puis après, j’écoute l’écho
La résonnance, je vois les
gens qui m’ont lu
Ou qui veulent me lire
Je vois toutes sortes de gens
J’ai même été capable de sentir
leur cœur
Ça bat fort un cœur qui croise un semblable
Ça fait comme moi des fois
Ça balbutie, ça sait pas où commencer
Ça bégaie, ça palpite, ça va vite
Ça fait passer une galaxie
Par l’entonnoir de la bouche
J’aimerais dire à ces cœurs
Que je les ai vus
Comme un refuge à chaque promenade
Je les ai vus émus, anxieux, ouverts, croches, vulnérables, curieux
Comme ces gens en alphabétisation
Ils étaient splendides et nerveux et fébriles
Une question préparée sur leur papier
Et toute la fierté du monde
D’avoir traversé mon recueil
De la première syllabe
Au dernier vers
Je les ai vus
Le même genre d’élan que toi Elsie
Mon bébé tsunami
Le même océan dans le cœur
La même envie de dire
La même désinvolture
La parole sans contrainte
La parole libérée
La parole qui attendait juste un go
De quelqu’un qui écoute
Je me suis sentie enveloppée
D’être importante pour eux
Parce qu’ils l’étaient pour moi
Je les ai vues, les femmes symbiose,
Les femmes truck
Les femmes de soie et de béton
Les femmes vécues et celles à vivre
Les foudroyantes
Les approximatives, les brillantes
Les comètes
Nous nous sommes reconnues
Des fois juste par les yeux
Des fois unies dans un sanglot
Je les ai vus les étudiants endormis
Pendant ma conférence à 8h le matin
Celle où mon cœur est tombé par terre
Celle où la panique a pris le volant
Devant tout l’monde
Je suis excellente pour éclater devant tout l’monde
Je les ai vus me voir
Et puis m’atteindre
Attendre que je revienne
Me regardant patients
Intrigués, incrédules ou émus
Et je suis revenue
Vertigineuse et improbable
Fragile et vulnérable
Forte et douce
Et on m’a dit merci
On m’a dit merci d’avoir eu ce courage
Merci d’être faillible
Je ne savais pas qu’on avait le droit
Ben justement
Je voudrais leur dire plus vigoureusement
Qu’on a le droit
Je voudrais vous dire
Que vous avez le choix
Pis si vous ne vous
sentez pas capable
Venez l’être à côté de moi
Dans le creux de mes bras
On est dimanche
La poussière retombe
Le cœur se dépose
Maman s’en vient
Maman est là
Le quatrième texte de l’écrivaine en résidence a été lu sur la scène de l’Espace Radio-Canada lors de la cérémonie de clôture du Salon du livre, le 31 mars à 16h.
Troisième texte de l’écrivaine en résidence
Deuxième texte de l’écrivaine en résidence
Premier texte de l’écrivaine en résidence
Parle
De tes approximations
De ta maladresse
De cette chaleur qui monte
Quand il faut dire les choses
Des embouteillages émotifs qui serrent ta gorge
De ta pensée galaxie et l’entonnoir de ta bouche
Parle de ce qui vit dans ton regard
Ce qui explose et jaillit de part tes yeux
La vastitude ton univers
Ce réel qui est le tien
Ce qui te nourit
T’émeut
Te scie les bras
T’arrache le cœur qui coule de l’or dans tes fissures
Parle
Raconte-moi l’ivresse de tes aurores
« Tout est possible »
Et ces journées qui n’en finissent plus de ne pas finir
Tes soupers interminables, les devoirs et l’heure du bain
Des crises carabinées et des bouttes du boutte
Où même la lumière s’est pas rendue au bout du tunnel
De toi à côté d’la laveuse en sanglot
Recroquevillée dans le silence
Trompeur de l’après-midi
Parle
De ton corps exténué
De ton dos brisé, tes mains rugueuses
Tes ongles noircis par la graisse des machines
De chaque jour de la semaine
En forme de combats et de tes replis dans le rang de la fatigue infini
Parle de ta colère par esthétique
De ton gros bagage
De tes mercredis stériles dans le ventre, du vide,
de cette voix que tu cherches dans tous les échos de corridors
Parle
Avec ta langue sale
Ta langue croche, tes mots patchés, tes discours en courtepointe,
tes hoquets d’anxiété
Ton incertitude, ta fragilité de papier de soie
Parle
Jusqu’à ce que ta gorge râpe
Que ton cœur vocifère,
Parle jusqu’à la colère ou l’apaisement
Parle comme tu peux, pas comme il faut
Parle irrévérencieusement
Parle amoureusement
Parle, parle jusqu’à ce que tous les mots tourbillonnent, s’entrechoquent, indignent et réparent
Parle en shrapnels, en missive, en prière, en braille, en anglais, en alexandrin
Juste qu’on sache que t’es pas mort
Marjolaine Beauchamp, écrivaine en résidence 2019
Marjolaine remporte en 2010 l’argent à la coupe du monde de slam en France. Elle publie aux éditions de l’Écrou, Aux Plexus et Fourrer le feu. Les pièces Taram et M.I.L.F, pour lesquelles elle écrit et joue, sont produites par le théâtre du Trillium pour lequel elle est auteure associée. Marjolaine assure la première partie de Richard Desjardins lors de la tournée l’Existoire. En 2018 elle publie sa pièce MILF aux éditions Somme Toute. Les rapports de genre, les procédés impliquant les altérations et les modifications d’œuvres littéraires ou visuelles, les nouvelles écritures ainsi que la médiation culturelle sont au centre de ses intérêts. Elle a reçu le Prix du CALQ – Œuvre de l’année et également le Prix du CALQ – Créateur de l’année en décembre 2018 pour la pièce MILF.
Brunch littéraire
Le Salon du livre de Trois-Rivières vous propose cette année de combiner nourritures terrestres et spirituelles lors d’un brunch littéraire qui se tiendra le dimanche 31 mars de 10h à midi au CECi (salle Vision A). Vous pourrez profiter d’un succulent buffet tout en écoutant plusieurs auteurs se confier à Patricia Powers.
Les invités seront le président d’honneur Normand Baillargeon, Simon Boulerice, Francis Desharnais, Isabelle Dumais et Marie Laberge. Essai, romans jeunesse et adulte, poésie et bande dessinée seront ainsi abordés dans une ambiance détendue, le tout enjolivé d’un accompagnement musical feutré signé Gilles Hamelin. Le nombre de places est limité. Les billets sont en vente au prix de 30$ taxes incluses à la librairie l’Exèdre, aux librairies Poirier de Trois-Rivières et Shawinigan ainsi qu’aux bureaux du Salon du livre (819-376-5308). Ces billets vous permettront bien entendu de profiter de toutes les autres activités du Salon du livre lors de cette journée.
Cette activité a pu être mise en place grâce au soutien de notre partenaire,
le Complexe funéraire J. D. Garneau